Cette fois, je vais vous parler d’une forme d’hypersensibilité que la sclérose en plaques a réveillé en moi ou plutôt du « comment j’ai la larme facile »
Un homme ça pleure ?
Comme évoqué dans le chapitre précèdent, nous vivons dans une société où les principes, comme l’image de l’homme, ont encore la vie dure du moins dans le monde occidental. Dans les stéréotypes masculins, l’homme ne pleure pas. A contrario de la femme (qui a le droit d’être sensible), l’honneur, l’autorité et la force sont les symboles de la virilité, comme souvent exprimés dans de nombreux ouvrages classiques de la littérature française. Etre sensible et pleurer est mal considéré, voire même un signe de faiblesse.
Aujourd’hui les choses ont tendance à évoluer, la femme prend petit à petit une place plus centrale dans la société, elle devient elle aussi une poutre maitresse du foyer. Progressivement, portées par les mouvements féministes, les valeurs traditionnelles qui conditionnaient jusqu’alors la masculinité s’estompent.
Né dans les années 70, dans une famille très catholique (et on sait bien que l’Eglise est traditionnaliste), j’ai baigné dans cette idéologie. Donc vous comprendrez facilement, que dans mon idéal, un homme ça ne pleure pas!!!!
Et pourtant aujourd’hui dès que les choses me touchent, j’ai la larme facile. Oui un homme ça pleure et ce n’est pas honteux !
J'ai donc la larme facile
Quand je réfléchis à quel moment cela a commencé, j’ai du mal à le dire. Mais les dernières années où j’ai exercé mon métier d’animateur, j’ai remarqué quelques vibrations incontrôlées dans ma voix suivant les sujets. Surtout lorsque j’abordais les liens familiaux…
Premiers signes
Comme je l’ai expliqué dans les premiers chapitres, j’exerçais un métier passion, celui d’animateur pour les offices de tourisme. Dans ce métier, on parle souvent dans un micro et vivre avec passion ce que l’on dit ou commente (évènements sportifs, spectacles…) s’entend dans la voix (d’ailleurs c’est presque la première chose que l’auditoire entend), et avec beaucoup de fierté et d’assurance, je peux affirmer l’avoir fait très bien :-).
Environ 2/3 ans après la naissance de ma fille, je constatais que ma voix déraillait dès que le sujet me touchait personnellement, comme le fait de parler des enfants ou du bonheur d’être en vacances en famille ou pire quand je présentais un spectacle réalisé par les enfants lors de leur séjour (défilé, spectacle de cirque…). Je mettais ça sur le compte de la fatigue associée à une forte sensibilité cachée depuis toujours (on m’a souvent dit avoir un cœur gros caché derrière mes cheveux long, ma barbe et mes 1m90)
Puis quelques larmes
Les choses se sont petit à petit compliquées avec le temps, surtout lorsque j’ai commencé à animer les fêtes de l’école de mes filles. Il m’arrivait fréquemment suivant les phrases que j’énonçais (« ce sont vos / nos enfants », « faites du bruit pour eux », « ils ont le trac », « ils comptent sur vos applaudissements »…..), d’avoir les larmes aux yeux et je devais faire une pause pour reprendre mon souffle et gérer l’émotion qui m’envahissait. Si un proche s’en rendait compte, il y avait une larme à essuyer.
Et même dans le quotidien
Aujourd’hui, régulièrement il m’est très difficile d’aborder certains sujets sans extérioriser ma sensibilité se traduisant par des larmes. Du coup, compatissant, ceux qui m’écoutent, finissent quelquefois, par m’accompagner :-). Je me sens obligé de m’excuser car il n’y a, en apparence, pas de raison particulière à ce qui ressemble à une réaction extrême.
Maintenant cette forme d’hypersensibilité s’accroit et une simple chanson peut me faire réagir comme ça. Dernièrement il m’a été difficile de remercier un ami pour une marque d’affection qui m’a énormément touché (encore plus récemment un évènement douloureux m’a fait extérioriser par des sanglots l’attitude incompréhensible de certaines personnes…)
Quel rapport entre hypersensibilité et SEP ?
Quand j’ai commencé cet article, je ne faisais pas spécialement de rapprochement entre l’hypersensibilité (ou sensibilité très forte) et la sclérose en plaque en particulier.
Pourtant on constate assez vite dans les témoignages de sépiens (comme celui de Lisa par exemple) que c’est assez répandu. On peut effectivement penser que notre « fragilité » nous rend plus réactif à une accumulation d’émotions sur laquelle nous avons mis un couvercle pendant des années (y compris celles antérieures au diagnostic) et que dans une recherche d’apaisement psychique ou un épuisement du système nerveux on se relâche et que la cocotte minute explose (et chez nous la vapeur ce sont les larmes). Ce constat peut se faire chez de nombreuses personnes atteintes de pathologie autres que la SEP.
En conclusion
Lorsque j’ai voulu écrire cet article, je voulais évoquer ce dont on parle moins lorsque des actions de sensibilisation à la sclérose en plaques sont menées (d’ailleurs le 30 mai, c’est la journée mondiale de la sclérose en plaques) : les troubles d’une pathologie dégénérative telle que la SEP, ne sont pas uniquement moteurs. Il y a aussi une partie encore moins visible et cette forte sensibilité en fait partie.
Pour terminer je voudrais mettre un coup de pied à cette idée reçue que pleurer est un signe de fragilité.
Non, il me semble important d’accepter ce trait de caractère, c’est une part de notre personnalité. Le combattre reste vain et épuisant. Au départ, j’avais du mal, moi-même à l’accepter, surtout lorsque ma fille ainée s’empêchait d’exprimer ses propres sentiments de peur de voir son père pleurer. Mais aujourd’hui, je travaille sur ce point et petit à petit je sens des tensions qui se libèrent.
Si parmi mes lecteurs (touchés ou non par une pathologie), vous menez des actions pour vous apaiser n’hésitez pas à me faire part de votre expérience en commentaire.
2 commentaires
Nan mais c’est surtout les parisiens qui pleurent….Non ? ?
🙂